COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE en date du 17 janvier 2019
Indemnisation d'un manifestant renversé par un véhicule qui a tenté de forcer un barrage lors d'une manifestation.
Notre cabinet a été amené à traiter d'une affaire concernant un manifestant chauffeur de taxi qui avait été renversé par un véhicule VTC lors d'une manifestation sur la voie publique.
L'assureur du véhicule de la partie adverse avait soutenu que notre client ne pouvait être indemnisé du fait que son comportement était selon ce dernier à l'origine de l'accident.
Le Tribunal de Grande Instance de NICE avait pour partie retenu cette argumentation et rejeté la demande d'indemnisation formulée par notre client.
La Cour d'Appel dans l'Arrêt reproduit en annexe a réformé cette décision en retenant notre argumentation.
En effet, toute personne non conducteur a droit à indemnisation intégrale de son préjudice corporel dans le cadre d'un accident impliquant un véhicule terrestre à moteur sous réserve de ne pas avoir commis de faute inexcusable à l'origine exclusive de l'accident.
En l'espèce, la Cour estime à juste titre que le fait de se mettre devant un véhicule pour le bloquer dans le cadre d'une manifestation ne peut en aucun cas être assimilé à cette exception.
Elle retient de même que le comportement de notre client s'analyse comme une simple faute d'imprudence.
En exécution de cette décision qui fait une bonne et juste application de la loi, notre client peut maintenant être indemnisé de son entier préjudice.
N'hésitez pas à nous contacter pour plus de renseignements sur ce type de situation au 04.93.58.10.96 ou par courriel
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COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
Chambre 1-6 anciennement 10ème Chambre
ARRET MIXTE DU 17 JANVIER 2019
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 20 Juillet 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/06101.
APPELANT :
Monsieur L...,
représenté par Me D…, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Florian FOUQUES, avocat au barreau de GRASSE
INTIMES :
Monsieur C…,
représenté par Me N…, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
CPAM DES ALPES-MARITIMES, dont le siège social est 48 rue du Roi Robert Comte de Provence - 06180 NICE CEDEX 2 ,
représentée par Me V…, avocat au barreau de GRASSE
Assurance A…,
représentée par Me B…, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 13 Novembre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Anne VELLA, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries..
La Cour était composée de :
Monsieur Olivier GOURSAUD, Président
Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller
Madame Anne VELLA, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier présent lors des débats : Madame Sylvaine MENGUY.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2019.
ARRET :
Réputé contradictoire
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2019,
Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Alors qu'il participait à une manifestation au niveau de l'entrée de l'aéroport de Nice dans le cadre d'un conflit opposant les chauffeurs de taxi aux chauffeurs de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC), Monsieur L…, qui exerce la profession de chauffeur de taxi, a été victime, le 15 mai 2014, en tant que piéton, d'un accident de la circulation, impliquant le véhicule conduit par Monsieur C…, assuré auprès de la société A…,
Par actes des 2 novembre 2015 et 5 novembre 2015, Monsieur L… a fait assigner Monsieur C… et son assureur la société A…, devant le tribunal de grande instance de Nice, pour les voir condamner à l'indemniser de ses préjudices corporels et au préalable voir ordonner une mesure d'expertise et obtenir une indemnité provisionnelle et ce, en présence de la CPAM des Alpes Maritimes.
Par jugement du 20 juillet 2017, cette juridiction a:
- Débouté Monsieur L… de l'intégralité de ses demandes;
- Débouté la CPAM des Alpes Maritimes de l'intégralité de ses demandes;
- Condamné Monsieur L… à payer à la société A… la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
- Débouté Monsieur L… et la CPAM des Alpes Maritimes de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile;
- Condamné Monsieur L… aux dépens avec distraction;
- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.
Pour exclure tout droit à indemnisation, le tribunal a relevé que l'exploitation de la vidéo surveillance montrait que le véhicule VTC conduit par Monsieur C…, sortait d'un stationnement lorsqu'il a été bloqué par un individu sur la chaussée qui avançait lentement, lorsqu'un second individu, Monsieur L…, s'est placé devant et a sauté sur le capot. Monsieur H…, responsable de la sécurité a témoigné avoir vu la veille, Monsieur L…, simuler un accident avec un VTC. La juridiction a considéré que Monsieur L… a été percuté en se plaçant volontairement sur la trajectoire du véhicule conduit par Monsieur C… et qu'il a ainsi commis une faute exclusive de son droit à indemnisation.
Par acte du 3 août 2017, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, Monsieur L… a interjeté appel général de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses conclusions du 18 octobre 2017, Monsieur L… demande à la cour de:
- Réformer le jugement;
- Désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec mission d'évaluer les conséquences médico-légales de l'accident dont il a été victime;
- Juger qu'il est bien fondé à se prévaloir de son droit à indemnisation en qualité de piéton;
- Juger que Monsieur C… est responsable de l'accident dont il a été victime;
- Condamner in solidum Monsieur C. et la société A… à lui verser une provision de 10 000€ à valoir sur l'indemnisation de son préjudice;
- Surseoir à statuer s'agissant de l'indemnisation définitive de son préjudice dans l'attente du rapport d'expertise intervenir;
- Condamner in solidum Monsieur C… et la société A… à lui verser la somme de 3000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'implication de Monsieur C… qui conduisait le véhicule qui l'a percuté alors qu'il évoluait sur la chaussée en qualité de piéton ne peut faire l'objet d'aucune contestation. Ce véhicule est seul à l'origine de l'accident comme le révèle le témoignage de Monsieur B... Il invite la cour à ne pas opérer de confusion entre la journée qui a précédé l'accident et le jour de l'accident. Ce qui a pu se produire la veille n'a aucune incidence sur la preuve rapportée des circonstances de l'accident du 15 mai 2014.
Le fait de participer à une manifestation ne peut caractériser une faute inexcusable à l'origine exclusive de l'accident.
Il fait valoir que Monsieur C… est arrivé dans le rond-point et des chauffeurs de taxi l'ont empêché de passer en lui barrant la route. Un gendarme est allé lui parler et soudain il a démarré en se dirigeant vers eux qui se trouvaient à environ 50 m devant. Il a pilé deux ou trois mètres avant puis il a redémarré en venant le percuter. Il est faux de dire qu'il s'est jeté sur la voiture de Monsieur C…, dont il n'a d'ailleurs pas été la seule victime, puisqu'il a également occasionné des blessures à Monsieur M... Il n'a pas commis de faute inexcusable.
Le bilan médical démontre qu'il a subi un choc important lors de l'accident tant d'un point de vue physique que psychologique et il est indispensable d'ordonner une expertise pour évaluer précisément l'ensemble de ses préjudices. Les éléments médicaux qu'il produit établissent qu'il présente désormais une boiterie à la marche et un genou toujours inflammable, ce qui justifie le versement d'une indemnité provisionnelle de 10 000€.
Dans ses conclusions du 15 décembre 2017, Monsieur C… demande à la cour de:
- Débouter Monsieur L… de toutes ses demandes, fins et conclusions;
à titre principal
- Confirmer le jugement en toutes ses dispositions;
à titre subsidiaire si la cour devait faire droit aux demandes de Monsieur L…
- Juger qu'il devra être relevé et garanti de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre par son assureur, la société A… ;
- Condamner Monsieur L… au paiement de la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il demande à la cour de constater que les faits ne se sont pas exactement produits de la manière dont Monsieur L… les expose, les éléments contenus dans l'enquête policière venant démontrer qu'il est à l'origine de son accident. Si effectivement les faits qui se sont déroulés la veille, le 14 mai 2014, n'ont pas d'incidence sur l'accident du 15 mai 2014, en revanche les mêmes faits de manifestations de blocage des chauffeurs de VTC de taxi aéroport de Nice ont bien continué le 15 mai 2014.
Comme l'a fait le premier juge, il renvoie la cour aux enregistrements vidéo que les enquêteurs ont pu décrypter. Il en ressort que pour éviter de le percuter, Monsieur L… a mis ses bras en avant et a sauté sur le capot du véhicule qu'il conduisait en s'accrochant aux essuies glaces. C'est donc en se plaçant volontairement sur la trajectoire du véhicule qu'il conduisait, qu'il a commis une faute exclusive de son droit à indemnisation. Cette analyse est confirmée par le témoignage de Monsieur H… mais aussi par celui de Monsieur Ch... Il fait valoir que Monsieur L… n'était pas à son premier coup d'essai, puisque la veille, il avait provoqué un accident ce qui résulte des faits relatés par le capitaine de police Monsieur B... Ses allégations selon lesquelles il aurait été renversé sont mensongères et infondées.
Il aurait été insensé de sa part de le percuter dans un aéroport et en présence d'autant de chauffeurs de taxi.
Selon conclusions du 18 décembre 2017, la société A… demande à la cour:
à titre principal
- Confirmer le jugement;
- Constater que Monsieur L… a commis une faute exclusive de son droit à indemnisation;
- Le débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;
à titre subsidiaire si la cour entendait réformer le jugement,
- Constater que l'accident résulte d'un fait volontaire de Monsieur L… ;
- Prononcer en conséquence sa mise hors de cause;
en tout état de cause
- Condamner tout succombant lui payer la somme de 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de son conseil.
Elle développe une argumentation similaire à celle de son assuré, Monsieur C...
À titre subsidiaire, si la version des faits de Monsieur L… devait être retenue, cela signifierait que nous sommes en présence d'un acte volontaire commis par Monsieur C… qui n'entre pas dans la définition de l'accident de la circulation telle qu'elle résulte de la loi du 5 juillet 1985 et il conviendra en conséquence de la mettre hors de cause.
Selon conclusions du 15 décembre 2017, la CPAM des Alpes Maritimes demande à la cour de:
- Accueillir son appel incident;
- Réformer le jugement;
- Juger que ses droits à remboursement seront réservés jusqu'à la fixation du préjudice subi, y compris pour tous les débours actuels et futurs servis pour le compte de la victime;
- Juger qu'elle s'en rapporte sur les demandes d'expertise et de provision formulées par Monsieur L…, n'ayant pas d'observations particulières à formuler;
- Statuer ce que de droit sur ses demandes;
- Condamner in solidum Monsieur C… et la société A… à lui payer la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au profit de son conseil.
Elle fait valoir que Monsieur L… ne s'est pas jeté sur la voiture conduite par Monsieur C…, mais qu'il a bien été renversé par ce chauffeur. Aucune faute ne peut lui être reprochée. La victime verse aux débats de nombreuses attestations circonstanciées.
N'étant pas en mesure de chiffrer le montant de son recours en l'absence d'expertise, elle demande à la cour de renvoyer l'examen de sa créance à la liquidation du préjudice corporel. Elle fait désormais état de dépenses de santé actuelles correspondant à de prestations en nature pour un montant de 145,83€, et des indemnités journalières pour 3150,08€.
L'arrêt sera contradictoire conformément aux dispositions de l'article 467 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il n'est ni discuté ni discutable que Monsieur L… avait la qualité de piéton au moment où l'accident s'est produit.
Par application de l'article 3 de la loi du 5 juillet 1985, les victimes, hormis les conducteurs de véhicule terrestre à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne, qu'elles ont subies sans que puisse leur être opposée leur propre faute, à l'exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l'accident.
Sur les circonstances de l'accident, nous disposons du témoignage direct de la victime et de celui d'un témoin, mais aussi de la transcription par les services enquêteurs d'une vidéosurveillance du rond-point.
Monsieur L… a exposé que le 14 mai 2014 et le 15 mai 2014 avec des chauffeurs de taxi de Nice et de Cannes, ils ont décidé de bloquer le passage vers le terminal 1 de l'aéroport de Nice à tous les véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC) pour manifester leur désaccord sur la délivrance préfectorale à leur avantage de licence. Ils étaient positionnés, par petits groupes, au niveau d'un rond-point desservant les accès, entourés par des policiers de la CRS et des membres de la chambre de commerce et d'industrie (CCI).
Il a relaté qu'un chauffeur VTC de type fourgon a échangé avec un membre de la CCI qui lui a dit qu'il ne pouvait pas passer, le chauffeur a répondu "non" puis il a engagé une vitesse et a accéléré dans la direction d'un des groupes formés par les chauffeurs de taxi puis il a dit "alors que nous étions au milieu du rond-point j'ai été percuté par le véhicule au niveau du côté gauche de mes côtes et au niveau de ma jambe droite. Pour éviter le véhicule et pour ne pas me faire écraser, j'ai mis mes deux bras en avant pour m'accrocher au capot du fourgon VTC, j'ai sauté sur le capot du véhicule, le chauffeur a freiné et j'ai donc été projeté à terre". Plus loin, répondant à une question de l'enquêteur il a dit : "je suis resté au milieu, personne ne doit passer, c'est comme ça, donc je ne me suis pas enlevé et je suis resté au milieu de la voie".
Monsieur B… a déclaré que lorsque "le chauffeur du Vito (Monsieur C…) est arrivé au rond-point nous l'avons empêché de passer en lui barrant la route et on lui a fait signe d'aller à droite.... Il n'a pas voulu aller à droite. Un gendarme est allé lui parler et soudain le chauffeur a démarré se dirigeant vers nous qui étions à environ cinq mètres devant. Il a ensuite pilé deux ou trois mètres avant nous, puis il a redémarré nous fonçant dessus. Je me trouvais sur la droite de mon ami Monsieur L... Le véhicule Vito arrivant sur lui, Monsieur L… a sauté sur le capot de ce dernier pour éviter de se faire rouler dessus. Là il s'est accroché aux essuie-glaces du véhicule, il était face au conducteur puis est retombé par terre devant le camion".
Les enquêteurs ont transcrit les images de la vidéo-surveillance du rond-point au moment où l'accident dont Monsieur L… a été victime a été filmé. Il y est indiqué qu' "un chauffeur de taxi identifié comme étant Monsieur L… se trouve cinq mètres devant le VTC au milieu de la voie menant au terminal 1. Le VTC fait marche arrière avant et se déporter sur la gauche afin de contourner Monsieur L... qui se déplace sur sa droite pour se retrouver en face du VTC alors que s'il était resté à sa place initiale, le VTC aurait pu passer librement. Le VTC continue à avancer quand Monsieur L… se trouve face au véhicule à un mètre environ, le VTC marque un coup de frein assez important car l'avant du véhicule qui "s'écrase" suite au freinage est bien visible sur la vidéo. Le VTC continue d'avancer malgré cela à faible allure, Monsieur L…, pour éviter d'être percuté, met ses bras en avant et saute sur le capot du VTC et s'accroche aux essuie-glaces du VTC. La chute de Monsieur L… au sol n'est pas visible sur la vidéo, tout comme le flanc droit du VTC après le choc... Le VTC effectue une marche arrière et percute un véhicule 4x4 noir".
Constitue une faute inexcusable imputable à un piéton, celle qui a un caractère volontaire, d'une exceptionnelle gravité, commise en l'absence de raison valable de son existence et dont son auteur aurait dû avoir conscience du danger.
La faute de nature à être retenue à l'encontre de Monsieur L…, qui s'est placé devant le véhicule de Monsieur C… a un caractère manifestement volontaire, commise non pas sans raison valable, mais pour empêcher ce dernier de progresser sur la chaussée, alors qu'il circulait à faible allure, dans le cadre d'une manifestation opposant les chauffeurs de taxis et les chauffeurs de VTC. Si Monsieur L… aurait dû avoir conscience d'un risque auquel il s'exposait, ce risque n'était que très éventuel, le fait que Monsieur C… ait continué d'avancer malgré sa présence n'étant pas inéluctable. Les deux témoignages relatés, ainsi que l'analyse de la vidéo-surveillance établissent en effet que Monsieur L… ne s'est pas jeté sans raison sur le capot, mais pour éviter d'être percuté en mettant ses bras en avant. De plus la faute que Monsieur L… a commise, n'est pas d'une exceptionnelle gravité mais s'analyse comme une imprudence. En conséquence le droit à indemnisation de Monsieur L… qui n'a pas commis de faute inexcusable est entier. Le jugement est réformé de ce chef.
Il convient en conséquence d'ordonner une expertise médicale dans les termes définis au dispositif du présent arrêt et dont la charge de la consignation incombera à Monsieur L...
Les éléments médicaux communiqués aux débats et plus précisément le certificat médical établi par le docteur Keucker le 12 juin 2014 mentionne que le compte rendu d'hospitalisation du 15 mai 2014 fait état d'un choc direct du genou droit, qui présentait déjà un état pathologique antérieur pour lequel, Monsieur L… était suivi par le docteur Roch, chirurgien orthopédiste, et d'un traumatisme du bassin. Le docteur Keucker rapporte une exacerbation de la douleur du genou droit avec impotence fonctionnelle accentuée par rapport à l'état antérieur et un choc émotionnel intense et il envisage un déficit fonctionnel temporaire total et partiel, des souffrances endurées et un déficit fonctionnel permanent à préciser dans son étendue compte tenu de cet état antérieur. Selon ces données, la cour évalue à 5.000€ le montant de la provision à allouer et à valoir sur l'indemnisation définitive du préjudice corporel.
Sur les demandes annexes
Il convient, conformément à sa demande, de réserver les droits de la CPAM des Alpes Maritimes.
La société A… et Monsieur C… qui succombent partiellement dans leurs prétentions et qui sont tenus à indemnisation supporteront la charge des entiers dépens de première instance.
Les demandes de paiement de sommes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens d'appel sont réservés.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
- Infirme le jugement,
Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
- Dit que le droit à indemnisation de Monsieur L… est entier;
- Dit que Monsieur C… et la société A sont tenus in solidum au paiement des conséquences dommageables de l'accident dont Monsieur L… a été victime;
- Ordonne une expertise,
- Désigne pour y procéder :
Le docteur T…
à défaut,
Le docteur J…
Lequel aura pour mission de:
*convoquer et entendre les parties, recueillir leurs observations et se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,
*examiner Monsieur L…,
* indiquer son état antérieur à l'accident du 15 mai 2014,
* décrire les lésions qui lui ont été causées par l'accident,
* en exposer les conséquences,
* estimer la durée du déficit fonctionnel temporaire total et/ou partiel en indiquant la date de consolidation des blessures,
* déterminer la ou les périodes pendant lesquelles cette victime a été dans l'incapacité d'une part d'exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle, d'autre part de poursuivre ses activités personnelles habituelles ; en cas d'incapacité partielle en préciser le taux,
* apprécier le degré des souffrances physiques et/ou psychiques endurées,
* évaluer le taux de déficit fonctionnel permanent qui peut subsister, avec le cas échéant sa répercussion sur la vie professionnelle,
* indiquer si l'état de la victime nécessite l'assistance d'une tierce personne, à titre temporaire ou permanent ; déterminer l'étendue de ce besoin en aide humaine en précisant la nature des actes concernés par la perte d'autonomie et la durée quotidienne ou hebdomadaire indispensable,
* donner son avis sur le préjudice esthétique,
* donner son avis sur le préjudice sexuel,
* donner son avis sur le préjudice d'agrément spécifique,
* répondre explicitement et précisément, dans le cadre de ces chefs de mission, aux dires des parties, après leur avoir fait part de ses premières conclusions et leur avoir imparti un délai pour présenter ces dires, délai qui ne pourra être inférieur à un mois,
- Dit que l'expert pourra, s'il le juge nécessaire recueillir l'avis d'un autre technicien dans une spécialité distincte de la sienne,
- Dit que l'expert devra déposer son rapport au greffe de la Cour d'appel d'Aix en Provence (10° chambre) dans les quatre mois de l'avertissement qui lui sera donné par ce greffe du versement de la consignation, sauf prorogation du délai dûment sollicitée auprès du juge du contrôle en temps utile,
- Dit que conformément à l'article 173 du code de procédure civile, en le mentionnant dans l'original, l'expert devra remettre aux parties et aux avocats copie de son rapport,
- Dit que Monsieur L… devra consigner dans le mois de la présente décision la somme de 650€ à la Régie d'Avances et de Recettes de la Cour d'appel d'Aix en Provence destinée à garantir le paiement des frais et honoraires de l'expert,
- Rappelle qu'à défaut de consignation dans le délai et selon les modalités imparties, la désignation de l'expert est caduque, à moins que le magistrat chargé du contrôle de la mesure, à la demande d'une des parties se prévalant d'un motif légitime, ne décide une prorogation du délai ou un relevé de caducité,
- Désigne l'un des membres de la 10ème chambre de la Cour pour contrôler l'expertise e ordonnée,
- Condamne in solidum Monsieur C… et la société A… à payer à Monsieur L… la somme de 5.000€, à titre provisionnel et à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice corporel;
- Condamne in solidum Monsieur C… et la société A… aux dépens de première instance;
- Réserve les droits de la CPAM des Alpes Maritimes;
- Réserve les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens d'appel;
ET LE PRESENT JUGEMENT A ETE SIGNE PAR LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.